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14 mai 2013 2 14 /05 /mai /2013 17:42


La Brute :

 

Alors comme ça on a du sang neuf au saloon hein ! La résurrection du lieu a attiré un "nouveau" dirait-on... Mouais, ce serait pas le premier...

S'en sort pas mal le gringo, ou plutôt "le Sale". Mais ne jamais tirer de conclusions hâtives, on entre pas comme ça dans la légende, sur 1 ou 2 bons coups, sur 2 ou 3 pièces glissées habilement... Au moins il n'a pas la langue trop pendue, chose plutôt rare.
 
On en a vu défiler des pieds tendres qui, tout en glissant leur pièce, soit se confondaient en excuses par peur du jugement, ou à l'inverse gonflaient le torse d'arrogance, ou bien encore, la goutte au front, se rependaient en palabres argumentaires inutiles sur leurs choix. Le tout face aux piliers immobiles et distants comme d'antiques statues divines, écrasant l'initié de toute leur hauteur mais néanmoins extrêmement 
attentifs à la qualité des galettes servies. 

Tout ceux-ci ont goûtés aux choix, à la lame effilée du Truand, coupant le flot de paroles dans un gargouillis étouffé de sang, les yeux écarquillés encore surpris de la vitesse à laquelle un rasoir peut parcourir le chemin entre 2 oreilles. Ou bien subi le choc de la sentence de la Brute, percutant comme un éclair et puissant comme un coup de tonnerre ceux là même surpris par la profondeur à laquelle  peut s'enfoncer un poing dans un visage, laissant leur joli minois froissé et retourné comme une chaussette sale. 
Bref, laissons le temps au temps, voyons ce que ce "sale" personnage nous cache sous sa crasse...
En parlant de temps, voila bien longtemps qu'ont disparu certains acteurs de notre saloon. Je pense notamment à Mr Weston appelé également l'Anonymous, toujours camouflé derrière son foulard, avachi sur sa chaise en équilibre dans le recoin sombre sous les escaliers. Cette fameuse chaise prend la poussière : où donc est parti répandre son silence ce fameux compère ?

Et nos 2 peaux rouges, Joe l'Indien et Billy Joe ? Ces deux là doivent certainement s'affairer dans quelques trafics obscures d'eau de feu...

Il faut faire attention, loin des yeux loin du coeur, un jour peut être ces membres ne retrouveront plus la commune fratrie à force d'absence répétées.

Vient M. Le Bon, ah M. Le Bon... Il y a maintenant quelques temps, nous étions de concert affairés à user de la piste de danse dans de lointaines contrées rambolitaines, fidèles au poste comme toujours. M. Le Bon, les poches pleines de pièces, prit un certain plaisir à faire se trémousser l'assistance à coups de morceaux bien choisis et habilement enchainés. Il n'y eut que la lueur de l'aube capable d'endiguer notre soif de son, de calmer notre frénésie de danse... ou bien était-ce une demoiselle acoquinée, s'obstinant à taquiner la brute pour d'autres aventures...
Bon, c'est pas tout ça, j'ai quelques pennys en poche qui ne demandent qu'à sortir. Je vois que le Truand garde un oeil vigilant sur le crasseux assis dans le coin. Le stade de l'observation n'est pas encore consumé, le premier round vient de s'achever, tout reste à faire.

Dans un regard moitié complice moitié craintif, Jack me ressert. Il reconnait depuis bien longtemps les signes d'un début d'agitation, a su dresser son flaire à capter les prémices d 'une catastrophe imminente.
L'alcool brûlant finit de me sortir de ma torpeur, j'ai la nuque raide, elle ne s'est pas agitée depuis quelques temps, j'ai besoin d'exercice...

Les jointures craquent, le tabouret grince, les talons cognent le plancher. J'agite les épaules, détends les bras, me frotte le visage. Montrons au nouvel arrivant et aux quelques badauds, partagés entre l'envie de spectacle et la peur d'y tenir un rôle mortuaire, que la Brute se réveille... et qu'elle est bien décidée à raviver l'ambiance du lieu. 
Pas besoin de baisser les stores, le soleil lui même a compris qu'il faut se faire discret. La pénombre envahit peu à peu les lieux, à mesure que l'appréhension, elle, envahit l'estomac des quelques personnes ici présentes. Commençons donc par le prélude:

Pour la suite, je vous invite tous à descendre dans la cave, la où gît le jukebox maléfique, couvert de crasse et de restes organiques, trônant au fond, dans la pénombre, à la manière d'une vieille chaudière de film d'horreur de série B, luisant d'une aurore malfaisante. La Brute apprécie tout particulièrement la noirceur des deuxième et cinquième tracks, c'est sombre, c'est sale, c'est brutalement noir :
http://www.thebirds05.com/?p=427

Les quelques traine savates jetés en pature à la Brute ici bas comprennent, à l'ambiance pesante, qu'il n'auront certainement plus l'occasion de fouler la grande rue au lever du soleil... L'unique ampoule vacillante et bredouillante éclaire avec parcimonie mon mauvais sourire qui brille de concert aux fentes qui me servent de regard. Les premières notes se mêlent au ton rocailleux, se frayant difficilement un passage du fin fond de la gorge de la Brute : "Prenez place messieurs, oui-da, on va bien s'amuser..."

S'en suivront de longues minutes douloureuses pour ces brebis égarées, offertes en pâture à la Brute. Les voilà les yeux effarés, courant en tout sens pour sortir de cet endroit cauchemardesque... et ne rencontrant que la dureté des murs en brique, brisant les élans, éclatant les nez dans leurs courses désordonnées... Même l'Anonymous grimace derrière son foulard devant la violence stroboscopée de cette séance de pure violence...

C'est avec un sourire satisfait que j'émerge des profondeurs du salon, couvert de poussières et de tâches sombres. Jack lui est rassuré, son bar tient encore debout, l'horreur s'est déroulée dans les sous sols... Il y a d'ailleurs bien longtemps qu'il n'ose plus y mettre les pieds car on ne pénètre pas impunément dans la salle de jeu de la Brute...
Messieurs, maintenant que l'ambiance est revenue au saloon, quel sera le prochain à faire tinter la fente d'une pièce bien ajustée... ? A vos bourses...

Le Truand :

Tapis dans un coin, le Truand observe... En voilà un, se dit-il, pour qui le poids de l'histoire importe autant que celui des mots. Sans, bien entendu, négliger celui des basses...

La conjoncture mondiale a bien changée et la Brute en a conscience : comme au cinéma, les acteurs d'hier ne seront désormais plus que les fantômes errants de demain, l’interchangeabilité des visages étant devenu la marque de fabrique de l'ère contemporaine...

Gare à ceux dont l'actualité date car dans le saloon comme partout, un fond de barillet aura rapidement fait de les renvoyer à l'état de souvenirs aussi périssables qu'une tambouille oubliée dans le fond d'un réfrigérateur...

Mort physique ou textuelle, même combat : la faucheuse emporte avec elle l'inexistant, frappant d'un coup sec et définitif ou l'accompagnant impassiblement en le tenant par la main...

Les aiguilles n'ont cessé de tourner à la table toute d'ombre recouverte. Cantonné à cette chaise dont l'assise a transformé son fessier en marbre lissé, le Truand clôt enfin en cette après-midi ensoleillée la liste d'or à laquelle la multitude de ronds de cuivre présents dans sa bourse donneront l'occasion de s'exprimer.

Prenez place, gens ancrés et gens effacés, la soirée ne sera perturbée que par la résurgence de l'empereur du ciel, cercle perçant aux contours dorés...

http://www.relatives.fr/article-in-my-headphones-week-7-114689889.html

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