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24 avril 2013 3 24 /04 /avril /2013 15:00


Riche aura été l'année passée en qualité musicale. Au-delà d'une mise en avant des albums marquants, il fallait rendre hommage aux incontournables de 2012 - pour lequels certains choix ont été cornéliens tant les opus les contenant étaient quasiment irréprochables. Totalement subjectif, voici en vrac, mes coups de coeur partagés d'un grand nombre ou uniquement par "Me, Myself and I"...

 
http://3.bp.blogspot.com/-nuHQbqMfo8Y/T5sz5tR_FUI/AAAAAAAAAbU/YWTvY1j5n6o/s1600/the%2Bbig%2Bshots%2B-%2Be-40%2B%2528feat.%2Byg%252C%2Biamsu%252C%2Band%2Bproblem%2529.jpg
E-40 - Function Feat. YG, Problem & IamsU

Un coup de surin, un attentat, une tempête balayant tout sur son passage : au royaume des bangers, "Function" serait l'indiscutable empereur de l'année, faisant fi de toute concurrence, imposant son minimalisme pesant, écrasant, laissant derrière lui un parterre de reins et de nuques brisés. Preuve en est que même la quarantaine passée, certains old-timers comme E-40 ne se contentent pas de survivre parmis la meute de jeunes loups affamés, ils peuvent encore prétendre à être, comme par le passé, des chefs de meutes adulés et respectés...


http://static.djbooth.net/pics-tracks/absoul-terroristthreats.jpg
Ab-Soul - Terrorist Threats Feat. Jhene Aiko & Danny Brown

Le moins exposé du Black Hippy nous aura gratifier d'un excellent album en 2012. Et comment dans sa folie et son timbre aux écarts psychotiques ne pas penser à ce cher Daniel Marron. Ce dernier le rejoindra sur un "Terrorist Threats" s'avèrant être le sommet du LP : des échappées de voix mystiques cadencées et destructurées entre lesquelles oscillent deux flows comme deux homonymes, deux miroirs d'une société américaine privilégiant la sauvegarde du monde qu'elle s'est mis en tête de construire et de protéger plutôt que le bien-être de ceux qui le constituent...

large-copie-1.jpgKendrick Lamar - Money Trees Feat. Jay Rock

On pourrait haïr Kendrick, se désintéresser du phénomène de l'année, celui porté par Dre, celui dont l'album a été unanimement consacré. Mais le garçon de Compton est quasiment inattaquable, son "Good City Maad Kid" étant d'une cohérence indéniable, d'une qualité palpable tant en termes vocal que musical. Il apporte également un brin de fraîcheur délectable que seules les mauvaises langues auront pu dénigrer. "Money Trees" n'est qu'une expression du reste : des chants tout en retenu cotoient des flows tantôt incisifs, tantôt discrects sur une instru qui nous berce et nous heurte alternativement. Dans ces conditions, n'intellectualisons pas, contentons nous d'apprécier...

http://www.themaskedgorilla.com/wp-content/uploads/2011/12/GodOfBlack1-e1323809669637.pngSPVCXGHXZTPVRRP - The Black God Feat. Doktor Dennis

Le chef de fil du Raider Klan n'a pas chomé en 2012. Sorti de l'ombre d'ASAP, il a enfin pu imposer sa musique cryptique et originel à la face d'un hip-hop qui n'avait jusqu'alors que faire du passé, submergé par un sudisme codéiné. "The Black God" confirme l'aisance du jeune originaire de Miami a ne rien recycler, à réinventer les contours du minimalisme sombre du golden age. Point de nostalgie donc mais un fait avéré : l'avenir voit se dresser
au loin un homme fier au sourire aiguisé, épaulé par une armée dont les rangs ne cessent de se développer...

http://s3.amazonaws.com/rapgenius/20120524-PARTY.jpgDom Kennedy - My Type Of Party

Il aurait pu être un californien parmis tant d'autre. Mais l'homme a trouvé sa voie et su s'entourer de la meilleure des façons. Avec un THC décidemment très en forme à la production d'une grande partie de sa Yellow Tape,
Dom Kennedy nous a regalé avec une des meilleures sorties de l'année. "My Type Of Party" n'est pas un banger tapageur, le titre renferme cette lancinance des bons moments en exprimant ce sentiment grisant de détente dans le confort de la convivialité. Le plaisir des choses simples, rien d'autre...


asap-rocky-1-train.pngA$AP Rocky - 1 Train Feat. Kendrick Lamar, Joey Badass, Yelawolf, Danny Brown, Action Bronson & Big K.R.I.T.

"1 Train" comme sept wagons filant à toute allure sur le chemin d'un succès prédestiné. Sept teintes différentes comme autant de styles, d'influences, d'origines, d'expressions. Un unique rail dont les parcelles semblent se répéter  à l'infini, efficacité et sobriété de mise pour laisser briller cette locomotive précieusement chargée. Une livraison sous forme de posse cut des années phares qui laissera assurément des traces de son passage...

http://cdn.stereogum.com/files/2012/06/The-Alchemist-Flight-Confirmation-608x608.jpgThe Alchemist - Flight Confirmation Feat. Schoolboy Q & Danny Brown

La répétition pourrait se proposer en définition de la musicalité dans le rap. Elle en est l'origine, les fondements, la base - que l'on pensait, pendant longtemps, inaltérable. Rejouer encore et encore un sample soigneusement trouvé avec cette immense fierté de l'avoir déniché... L'oreille est donc habituée mais peut se laisser surprendre, voir se hérisser lorsque qu'en lieu et place d'une boucle jazz ou soul, elle se retrouve confronter à un violon jouant avec insistance sur les 3 mêmes notes stridentes. L'irritation est cependant de courte durée face à l'énergie fédératrice déployée auditivement et visuellement - le clip étant une sorte de patchwork hallucinogène et subliminal. Une explosion savament orchestrée par deux MC's à la verve aiguisée. Sans oublier un producteur inspiré, assurément plus qu'il ne l'a souvent été...

http://thissongissick.com/blog/wp-content/uploads/2012/04/Kanye-West-Mercy-Stratus-Remix.jpgKanye West - Mercy Feat. Big Sean, Pusha T & 2 Chainz

Lorsque Yeezy lorgne du côté des sonorités sudistes, on fait face à un hit paradoxalement aussi riche qu'il est minimaliste. Une leçon de production sur laquelle
défilent des invités plus percutants les uns que les autres. Mister "my head's so big you can't sit behind me" s'accordera même une échappée solitaire sur un fragment euro-dance. Et le résultat dans tout ça : le meilleur morceau de rap de l'année. Wordless...


http://cdn.nahright.com/news/m.php/2012/07/gfid-450x450.jpgRick Ross - Sixteen Feat. André 3000

"Sixteen", c'est un peu comme si Jésus revenait sur terre et que cela passait inaperçu. Une bombe perdue au sein d'un album ayant susciter une attente folle pour ne laisser en bouche que le goût amer de la déception. Si la structure musicale soulage quand au fait que Rick Ross peut se laisser tenter par autre chose que des nappes synthétiques saturées et redondantes, la magie émane d'une autre source : Monsieur André 3000 - qui se fait si rare - honore de sa présence le morceau pour nous livrer ce qui s'avère être le meilleur couplet de l'année. Chant, guitare, longueur de la prestation, changements de flow, l'ex-Outkast impressionne, nous laissant espérer une fois encore un retour imminent du messi sur un long format...

http://www.deadhorsemarch.com/wp-content/uploads/2012/02/Schoolboy-Q-HnC-cover-e1325542647187-290x290.jpgSchoolboy Q - Oxy Music

De certains albums, il est difficile d'extraire un titre tant ils regorgent de constance dans la médiocrité. Pour d'autres, le choix est cornélien face à une qualité globale si diversifiée. Car dans une époque sponsorisée par le one shot / le single, un quasi-sans-faute sur 18 titres relève de la performance voir du miracle. D'autant plus lorsqu'il explore des univers, déroule des structures musicales si variés. On aurait donc pu glorifier une énième fois les "Hands On The Wheel", Druggys With Hoes Again" ou "There He Go" qui ne rident aucunement à mesure des écoutes. On retiendra plutôt ce concentré agressif de nervosité qu'est "Oxy Music".  Cette lancinance, cette voix éraillée au refrain, ce texte jouant des variations rythmiques comme il joue avec nos nerfs, cette simplicité musicale ravageuse intensifiant progressivement l'état d'urgence. Comme s'il était trop tard, comme si l'alarme sonnait depuis bien trop longtemps et que Schoolboy se posait en prêcheur resigné, homme du constat conservant ces dernières forces pour sa propre survie...

http://3.bp.blogspot.com/-xYLJHDNyfaA/UFMIfKCJrlI/AAAAAAAAClA/6dmDmSx_xdc/s1600/machines-that-make-civilization-fun-1.jpgBigg Jus - Black Roses

Si l'on décernait des grades quant aux faits d'armes, Bigg Jus serait un général confirmé. Major de la promotion 1997 pour avoir sorti, en compagnie d'un certain El-P, un des 5 albums majeurs de la vague indépendante, "Funcrusher Plus", l'afro-américain remet le couvert en solo 5 années plus tard avec le magistral "Black Mamba Serum" - sans oublier sa V2 tout aussi indispensable. Depuis 10 années ont passé et le mouvement alternatif gît désormais sous terre. Alors que doit-on attendre de l'ex-Company Flow en 2012 - si tant est que l'on en attend encore quelque chose ? Simplement une évolution aussi personnelle que peu accessible d'une musique qui enfonce les codes établis, qui ne rentre jamais dans le rang. Dissonante, déstructurée, parfois indigeste, Bigg Jus nous prouve qu'hier comme maintenant, il ne fera pas de concessions. A l'image de la linéarité suffocante de "Black Roses", sorte d'infini musical qui nous frapperait en cadence pour mieux nous relever après chaque coup assené, finissant de nous achever dans une nuée apocalytpique mettant à rude épreuve notre sens de la mesure...

http://f0.bcbits.com/z/22/99/2299250462-1.jpgLil Ugly Mane - Serious Shit

Les atmosphères lugubres ont toujours eu leur place dans le rap. De Three Six Mafia en passant par Gravediggaz au petit nouveau frenchy Mc Zombi, l'outre-tombe fait dans l'indémodable. Cependant au regard de l'artwork de "Mista Thug Isolation", on espère que son instigateur possède des goûts musicaux plus avertis que ses compétences en Photoshop - voir son appétence visuelle tout court. Mais n'est-ce pas Master P, son label No limit Records et leurs pochettes que la rétine fuit qui ont revolutionné notre sacro-saint mouvement ? On ne butera donc pas sur ce premier rempart pour s'apercevoir, dès les morceaux introductifs, qu'il était de bon ton d'aller dans cette direction. Concoctées soigneusement par son compère Shawn Kemp, les différentes ambiances dérangeantes et malsaines collent parfaitement au flow rauque et engourdi de Lil Ugly Mane. Variables à souhait, les morceaux constituant la mixtape s'inscrivent pour autant dans une cohérence manifeste. Et c'est "Serious Shit" qui déstabilisera le premier nos tympans. Guidés par un sample de saxophone incontrôlable et évolutif, les caisses claires et le shirley s'entrechoquent à une vitesse folle, nous proposant une ballade aventureuse qui boulversera nos repères, là où le conscious rap nous avait habitué à plus de calme et de lancinance dans l'utilisation du jazz. Le symbole d'un OVNI qui marquera 2012 de son empreinte morbide...

http://www.fakeforreal.net/public/Pochettes/2012/blue-sky-black-death-nacho-picasso-lord-of-the-fly.jpgBlue Sky Black Death & Nacho Picasso - Phantom Of The Opera

Le rap de France est une guerre de chapelle. Evoluer en vase clos, regarder nombriliquement sa musique, dénigrer autrui : il est paradoxalement le reflet d'un pays qui ne souhaite pas "se mélanger", paradoxalement vis-à-vis du discours de diversité culturelle prôné par les rappeurs eux-mêmes. Il en est tout autre de l'autre côté de l'Atlantique, continent sur lequel les projets transverses se multiplient. Certes, l'association de Blue Sky Black Death et de Nacho Picasso n'est pas un modèle de rapprochement des opposés, les deux acteurs évoluant sensiblement sur le même terrain de jeu. Mais elle réunit des chemins qui n'étaient pas destinés à se croiser, débouchant sur une réussite flagrante dont la qualité n'a cessé de s'améliorer à mesure des sorties de leurs
4 mixtapes en 2012. "Phantom Of The Opera" est comme le symbole de cette association fructueuse. Sur des atmosphères sombrement entonnées par nos deux whiteheads, Nacho Picasso distille sa voix nasillarde avec cette lenteur abyssale qui lui est propre. Comme une invitation à l'adoption de la noirceur, on se laisse aller à vouloir les rejoindre dans leur antre. Rien n'indique que l'on en ressorte indemne...

http://cdn.respect-mag.com/wp-content/uploads/2012/02/hodgy_cover_final.jpgHodgy Beats & The Alchemist - In A Dream

A l'instar de son confrère Domo Genesis, Hodgy Beats a su nous surprendre avec une mixtape naviguant en marge des productions d'Odd Future. Un EP de 9 titres produit de main de maître par The Alchemist dans lequel les atmosphères et inspirations se succèdent sans jamais se ressembler. "In A Dream" se détache cependant. Peut être est-ce cette voix entêtante qui se repète à en perdre haleine. Ou peut être est-ce tout simplement cette intense magie qui opère, fruit d'un chant à la frontière de l'agonie comme une lueur d'espoir dans la noirceur d'un monde apocalyptique...

http://keepittrill.com/online/wp-content/uploads/2012/03/trouble-431-days-mixtape.jpgTrouble - ATL Feat. Alley Boy

431 jours de liberté depuis sa sortie de prison et assurément pas 1 jour durant lequel Trouble a chômé. Constat sans détour au regard de la qualité impressionante de la livraison du natif d'Atlanta, mixtape survoltée n'ayant pas subit l'imbibage codéiné des semblables de sa région. Mais le jeune rappeur n'en oublie pas pour autant ses origines, livrant un "ATL" explosif, incongruement ponctué par un bref sample de voix de Ray Charles. Un exemple frappant que le Sud a matière à se renouveller, à faire évoluer une formule musicale dont seuls ces représentants ont les véritables clefs...

http://www.fakeforreal.net/public/Pochettes/2012/grandmilly-bandanaz-black-magic.jpgGrandmilly - 90z Bvby

L'étendu du Raider Klan n'a plus de frontières. Prenant sa source à Miami, c'est à New-York qu'on lui découvre un nouveau point d'ancrage. Ou quand les rues sombrent et mal famées puisent dans la moiteur texane pour retrouver ce qui a fait leur gloire, leur identité. C'est cette ambiance propre au crew que l'on retrouve dans l'album de Grandmilly. Mais les relents de boom-bap exploités par l'originaire de Long Island donnent une teinte particulière à sa musique, révelant une succession de titres dont l'intemporalité aguiche. Comme cette voix féminime pitchée sur "90z Bvby" répondant sensuellement au
récit étouffé de Grandmilly sur un instrumental souriant, démonstration idéale du paradoxe éternel d'un rap testostéroné qui rêverait secrètement de pouvoir pousser la chansonnette comme les grandes dames d'un autre temps...

http://i43.tinypic.com/11kblfp.jpgFroskees - The Silent Beyond Feat. T.I.

L'intitulé attirera les otakus, curieux du traitement
appliqué par Froskees à leurs musiques cultes. Et le résultat s'avèrera impressionant dans le sens propre du terme. Impressionante la manière dont ses compositions 8-bits trouvent une nouvelle vie en s'acoquinant avec des rappeurs de tous bords. Alléchante cette sensation de redécouverte de couplets connus sur le bout de la langue. Grisante enfin cette notion de méconnaissable, là où rien à part le nom n'ammènerait à deviner l'origine de ces samples. 3 qualités intrinsèques à "The Silent Beyond" passant du statut d'hymne à ciel ouvert à celui de messe noire des bas-fonds. Ou comment retrouver la juste valeur de T.I. par le biais d'une épaisseur musicale qui sied plus à son talent que les productions au rabais pour jeunes pousses en mal de reconnaissance auxquelles il nous a trop souvent habitué...

http://www.rawdrive.com/wp-content/uploads/2012/03/illogicAaronEvans-450x450.jpgIllogic and Aaron Evans - I'm Only A Drop

Le paysage rap des années 2000 n'aura pas seulement vu émerger une nouvelle région sur la carte des Etats-Unis, il aura abriter, en son temps, un courant alternatif des plus intéressants. Dans le peleton de tête, Illogic y surnageait. Même si ce mouvement est bien mort et enterré et même si ses dernières sorties ne peuvent se hisser au niveau de sa formidable collaboration avec Blueprint sur "Celestial Clockwork", Jahwar Glass de son vrai nom possède toujours cette aisance microphonique faisant de lui un conteur de sa société, un narrateur de son époque. L'effet reste similaire lorsque l'on extrait l'homme de son univers torturé pour l'emmener s'acoquiner avec le festif et l'enjoué : un sourire contenté aux lèvres, synonyme de compréhension mutuelle...

http://a5.mzstatic.com/us/r1000/113/Music/v4/cd/19/dd/cd19dd23-a389-82a3-c876-892b3ef64345/845350054255.170x170-75.jpgSon Rude - Twisted

Dansons, tournoyons jusqu'en perdre toute lucidité. Laissons nous bercer, atteindre le point de rupture de toute conscience réfléchie. Ne faisons plus semblant, ne considérons plus la foule nous entourant que comme un parterre d'ombres désarticulées semblant s'écarter progressivement à mesure que nos rotations corporelles se démultiplient, s'intensifient. Acceptons que nos regards se flouent, s'embuent, cristallisent cette forme hybride entre oppression et bien-être qui émane de tous nos pores. N'ayons plus d'yeux que pour celle ou celui qui nous fait face, notre ami, notre partenaire, notre amant. Et quand le crépitement du vinyle sonnera la fin de ce rituel chamanique, cessons de nous demander qui, du plaisir ou de l'angoisse, ressortira en grand gagnant
...

http://edge-img.datpiff.com/m447312b/Gucci_Mane_Trap_Back-front-large.jpgGucci Mane - Quiet

6 mixtapes en 2012 : depuis sa sortie de prison, l'internable Gucci Mane fait dans l'ultra-prolifique. Homme de son temps, ce dernier "officie sur sa propre évolution musicale en parfaisant un style surexploité, ne cherchant aucunement une quelconque révolution de son domaine de prédilection artistique" (pour citer Sylvain Bertot). On aurait donc pu citer "I'm Up" ou les deux premiers volumes de "Trap God" mais c'est le morceau "Quiet" qui attire ici notre attention. Débutant dans la discrétion la plus totale avec en texture les murmures lancinants de Gucci, l'instrumental nous emmène pas à pas vers des horizons électroniques débridés, structure bien évidemment appuyée par une ligne de basses tétanisante. On ressent alors, à l'instar de son instigateur, que la folie nous guette, qu'elle s'empare de nous jusqu'à nous faire perdre toute maîtrise. Une folie douce et gustative, un met de fin gourmet destiné uniquement aux initiés...

http://cdn.stereogum.com/files/2012/07/2-chainz-birthday-song.jpeg2 Chainz - Birthday Song Feat. Kanye West

Man Of The Year. L'ascension de 2 Chainz ne peut être considérée que comme un modèle du genre. Modèle de buzz, modèle de "placement de produit", modèle d'inscription dans la tendance et bien entendu modèle de renouvellement quand on constate que cette consécration s'opère à 35 années bien tassées. Sudiste invétéré, l'omniprésent a rapidement rejoint l'écurie all-star "G.O.O.D. Music" de Yeezy, le hissant définitivement au rang des imparables. Et c'est avec ce même hitmaker qu'il sortira le single de lancement de son album. Excellence de la production, surenchère habituelle mais non moins divertissante des textes, "Birthday Song" porte la célébration au paroxisme de l'opulence sous toutes ses formes. Et comme dirait une talenteuse créatrice, "ils avaient Stevie Wonder, nous on a 2 Chainz".

http://www.ladetentegenerale.com/onestpasbienla/wp-content/uploads/2012/03/Klub-des-loosers-La-fin-de-lesp%C3%A8ce.jpgKlub des Loosers - Destin d'Hymen

On avait quitté Fuzati dans les tourments de l'adolescence, on le retrouve dans les problématiques de l'âge adulte. Et assurément, rien n'a changé : toujours cette volonté de manifester désespoir et haine envers ses comparses bipèdes. Enfin si, certaines choses ont évolué. Le flow de notre suicidaire national s'est bonifié, a gagné en justesse en laissant quelque peu de côté cette accentuation des beaux quartiers d'antan. Sa musique, également, a gagné en maturité ; agréablement produite sur le premier album, elle devient plus personnelle, plus intimiste, quelque peu dérangeante même et hisse ainsi la qualité des textes à un niveau supérieur, l'exemple le plus frappant restant "Destin d'Hymen". Sur une nuée de voix féminines stridentes et saturées, le MC nous livre sa vision du couple. Pessimisme ? Dureté ? Non, juste un réalisme cinglant ponctué par les scratchs de Detect au refrain, impact de basses comme autant de claques assenées spontanément pour ouvrir les yeux sur une réalité qui n'a rien d'une comédie romantique américaine...

http://www.echosduhiphop.com/wp-content/uploads/le-feu-sacr%C3%A9-des-grands-brul%C3%A9s-lucio.jpgLucio Bukowski - C'est pas du rap

Soyons honnêtes : là où nous nous attardons peu sur le sens du message lors de l'écoute d'un morceau de nos confrères étrangers, nous contentant d'en apprécier son énergie musicale, il en est tout autre lorsque celui-ci est distillé dans la langue de Molière. En résurge alors toute notre appétance pour le choix des mots, leurs combinaisons, leurs imbriquements, leur vérité. Et comme l'égotrip est à l'origine
  de ce courant musical, pour ces fameuses punchlines. C'est dans ce domaine que le Lyonnais excelle, "C'est pas du rap" jouant de métaphores et de comparaisons comme pour rappeler que cette musique sait et se doit d'être aussi divertissante que sérieuse, aussi enjouée que désespérée. Qu'à la même époque que Public Enemy, The Fresh Prince avait également sa légitimité...

http://cdn.pitchfork.com/news/45886/1e748530.jpegDanny Brown - Grown Up

2012 : l'un des phénomènes les plus plébiscités de la scène rap parcourt le monde pour abreuver de son flow gueulard et extatique des foules entières. Les 12 mois passés ont été chargé, consacrant son "XXX" comme immanquable de l'année et propulsant son nom parmis la liste des 10 Freshmen privilégiés du magazine "XXL". Et c'est entre 2 concerts que l'édenté nous lâche cet imprévisible "Grown Up" en libre accès. Prenant à contre-pied sa dernière mixtape aux sonorités très industrielles, Danny nous pond un boom-bap jovial et rafraîchissant. Sample cotonneux de Gorillaz, scratch chantant au refrain, il nous raconte son ascension à la manière de ce qu'il est : un pensionnaire de Detroit de 30 ans voyant son succès comme la réussite du plus beau château de sable dans un jardin pour enfants...

http://1.bp.blogspot.com/-8hWyuWfeVBk/T9DKFCmriwI/AAAAAAAACGw/ClUs__VFJOE/s1600/Action+Bronson+Ft+Riff+Raff+Bird+On+A+Wire+Instrumental.jpgAction Bronson - Bird On A Wire Feat. Riff Raff

C'est d'abord la rencontre entre deux mondes. Celui d'Action Bronson, new Ghostface Killa à la street credibility indéniable, fier survivant d'une Big Apple déchue où les grands MC's se comptent désormais sur les doigts d'une main. Et celui de Riff Raff, ovni visuel, croisement entre Ali G et Polnareff, texan ubuesque à l'univers si décalé qu'il parvient à être accrocheur, intéressant (parfois). Des antipodes, que tout sépare donc, réunis sous la croupe d'un producteur aérien qui multiplie les collaborations depuis bientôt une année pleine, j'ai nommé Harry Fraud. Le redneck nous livre ici un son planant dans lequel certains y trouveront une sorte de mélancolie salvatrice, ce pincement qui n'incite pas au sourire mais dont on ne désire pas se détacher...

http://www.sweetpotion.com/wp-content/uploads/covers-artwork/singles/chief-keef-i-don-t-like-ft-lil-reese--1343742802-1.jpgChief Keef - I Don't Like Feat. Lil Reese

La régression intellectuelle peut-elle s'avérer jouissive ? Peut-on s'octroyer le droit d'apprécier la pauvreté lyricale ? Tout est une question d'impact sonore et d'auto-dérision.
Entre mièvrerie textuelle, masturbations pseudo-philosophiques et glorification chauvine du vide musical, notre pathétique chanson française contemporaine (les quelques exceptions m'excuseront) nous incite à appuyer frénétiquement sur le buzzer synonyme de réponse négative. Quant à Chief Keef et son 'I Don't Like", c'est l'effet inverse qui se produit. Car si le message delivré ne hissera nullement le Chicagoan comme le nouveau Rimbaud du ghetto, l'énergie dévastatrice qui s'en dégage agit comme une drogue addictive discrètement inseminée dans nos esprits. Comme le symbole d'un courant puisant sa force première dans la virulence et l'expression dans sa nature la plus brute. Comme une renonciation à toute réflexion le temps d'un tango la nuit noire tombée autour d'un baril enflammé dans une ruelle surpeuplée...

http://lilhiphop.com/wp-content/uploads/2012/09/clydecarson-slowdown.jpgClyde Carson - Slow Down Feat. The Team

"Slow Down", c'est un titre isolé qui ne confirmera pas son iniateur ni ne le fera passer dans la catégorie des rappeurs à suivre de près.
Le syndrome one shot donc qui, malgré ses faiblesses, balaye tout sur son passage. Un banger dont la fonction principale est de générer des déhanchés par milliers dès l'expression des premières notes de son sombre clavier. Le minimalisme dans son habit le plus sobre à savoir l'éfficacité...


http://www.fakeforreal.net/public/Pochettes/2012/propr-boyz-jesus-boys.jpg
Propr Boyz - Jesus Christ

Space Ghost Purrp, Lil Ugly Mane, Grand Milly : les Propr Boyz conclueront cette sélection, portant, une fois encore, haut les couleurs et la diversité de l'imparable Raider Klan. "Jesus Boys" aurait pour définiton l'ignorant rap blasphématoire et quoi de plus logique que de voir le track "Jesus Christ" en être le fier porte-parole. Insultant, vulgaire, cynique, rieur, le duo black & white s'auto-proclame comme progéniture du Saint Père devenu messie de la prositution, macro d'apôtres femmelles à qui il laissera leur virginité en les défleurant de manière détourné. Le tout sur un instrumental planant invoquant l'au-delà, celui des bête à cornes et non des anges à cordes. La messe est dite, l'assistance en ressort titubante, choquée. Ce dimanche, l'hostie a été très difficile à avaler...

 
Bonus

http://www.thebossboard.com/images/cobcypher2012.jpgCrooked I presents : C.O.B. Cypher 2012

En 2011, les 5 trublions de Shady Records accompagnés d'un DJ Premier en forme olympique rendaient aphone le public des Bet Awards avec un Cypher inégalable. 2012 : Crooked I, un des membres du Club des 5, présente à son tour ses copains de quartier. Si la deuxième partie reste substantiellement oubliable, la première ne fait pas dans la demi-mesure : des flows élastiques et éclectiques se chevauchent jusqu'à créer la confusion sur un mélange sonore savemment préparé, la superposition du "Adrenaline" de Twista et du "The Recipe" de Kendrick. Ou comment un crew que la renommée n'a jamais approché donne des leçons à un grand nombre de pontifiés...

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commentaires

V
<br /> Un grand bravo pour le taff fourni!<br /> <br /> <br /> De la quantité ET de la qualité.<br /> <br /> <br /> Personnellement très friand de ce genre de tops: ne retenir qu'une chanson à chaque fois et argumenter pour chacune. Bel exercice.<br /> <br /> <br /> J'ai le droit de confesser que je connaissais que 5 noms dans toute la page ? Et peut être une seule des chansons citées... :)<br /> <br /> <br /> Mais du coup, je vais écouter.<br /> <br /> <br /> Well done Truand, see you next time<br />
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