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10 mai 2012 4 10 /05 /mai /2012 00:00

 

Le Truand :

 

Gringos,

L'inactivité a comme une odeur acide de petite mort, l'impression que notre saloon si animé s'est désintégré, que les parois de bois, le bar pouilleux et les tabourets bancals se sont envolés pour laisser place à un désert aride ressemblant à s'y méprendre à la désolation du cimetière de Sad Hill.

Essayons de faire en sorte de ne pas remplir ces satanées tombes, réenfourchons nos fidèles destriers et reconstruisons ensemble ce lieu unique où les joutes verbales n'allaient de paires qu'avec la densité de remplissage de notre bon vieux juke-box.

Pour ce faire, comme lors une réouverture après liquidation, c'est un cadeau qui vous attend. Le Truand vous le tend, accoudé aux portes battantes, sourire malicieux sous son chapeau. Lui qui était en vagabondage entre Atlanta, Memphis, Houston et la Nouvelle Orléans a ramené dans sa besace une petite pépite, produit d'un ami commun déjà croisé lors de nos pérégrinations mais qui n'avait guère su convaincre sur album, j'ai nommé Mac Miller.

L'homme s'est laissé porter du côté du Sud, s’accoquinant avec des excentriques du coin et autres producteurs dont l'évocation du nom suffit à provoquer sueurs et tremblements chez le Truand.

Je vous laisse donc en sa compagnie sans vous demander le moindre denier mes amis :

http://www.macmillerofficial.com/

Et espère ne rester longtemps seul au comptoir d'un bar que je suis bien décidé à remettre sur pieds...

 

La Brute :

 

Home sweet home...

La lueur à travers les vitres sales, au beau milieu de la grande rue faiblement éclairée, symbolise enfin le retour à la vie de notre bon vieux saloon.
C'est l'esprit mélancolique que la Brute gravit les quelques marches menant au foyer musical, soulagé et espérant retrouver un acolyte depuis longtemps perdu de vue.

 

Qu'il est bon de retrouver un foyer accueillant... C'est comme retrouver un jouet ancien trop longtemps oublié, on a toujours nourri le secret espoir de le retrouver pour raviver d'anciens souvenirs et peu importe qu'il soit cassé ou abimé, c'est toujours la même charge d'émotion.

 

C'est donc le sourire aux lèvres que je franchis les portes battantes pour apercevoir le Truand accoudé au bar, discutant avec un Jack guilleret qui avait commencé à perdre l'espoir de raviver ce lieu autrefois si vivant. Les regards se croisent, les sourires s'élargissent, Jack, les yeux brillants, cache son émotion en astiquant un deuxième verre, le remplissant de sa meilleure gnôle. Le Truand me tend un tabouret après l'avoir dépoussiéré, je m'y assois avec délectation.

Après une bonne tape dans le dos, deux trois nouvelles échangées et 4 ou 5 brûle-gosier ingurgités, c'est avec le feu aux joues et l’œil rieur que je me tourne vers le juke box et écoute la proposition du Truand.
Voila une proposition qui sied à cette résurrection, auparavant déjà conquis par ce petit prodige, c'est avec plaisir que je découvre ses nouvelles cartouches. Il a un bon flow ce petit, il est bon esprit, le son est bon, tranquille. Ca fonctionne, la Brute acquiesce, le Truand de même.

C'est alors avec un clin d’œil complice que je descends de mon tabouret. Jack, lui, n'en perd pas une miette, bien trop heureux de retrouver ses bons vieux habitués qui firent l'animation et la réputation de ce lieu, lui le vieux témoin de toutes ces joutes musicales parfois tendues, animées ou bien encore dévastatrices mais toujours, bien entendu, festives.

J’insère donc ma pièce sachant d'avance que le Truand ne pourra qu'apprécier ; l'heure est à la bonhommie...
 

Mon choix se porte donc sur ce fameux Danny Brown, bien longtemps et lourdement revendiqué par le Truand (on frise la fixation parfois). J'ai longtemps montré quelques réticences sur ce chien fou au pelage étrange et à la dentition bancale mais il faut bien reconnaitre que ce morceau a su séduire la Brute. Le Truand a donc su finalement percer la carapace de scepticisme de la Brute, il faut dire que le bougre est allé jusqu'à me réciter et traduire les lyrics, c'est vous dire la volonté de convaincre...

 

Je voulais donc vous le faire partager. En effet pour moi tous les ingrédients y sont, c'est à dire trés peu, une caisse clair, un flow, quelques basses très profondes et un petit piano léger pour le refrain. Oui, je suis enfin conquis...
 

 


En espérant, mes chers cowboys, que ce regain d'animation vous attirera de nouveau à notre bon vieux saloon, comme un vautour patient en plein cagnard, flairant la fin toute proche de son futur déjeuner. Les tabourets sont maintenant propres, il ne reste plus qu'à entendre tinter vos santiags sur le perron grinçant...

 

La Brute :

 

Allez les cowboys, pour vous souhaiter un bon week end, voici un petit son qui flaire le printemps... A écouter lors d'une ballade au soleil, le sourire aux lèvres...

 

 

Le Truand :

 

Nujabes était un très bon producteur japonais, RIP...

J'ai longtemps écouté l'album Metaphorical Music. Avant j'adorais, maintenant, je trouve ça gentillet. C'est doux, calme, reposant... mais ça manque d'âme.

En soirée posée à discuter sans réellement écouter, c'est parfait. Au taf, lorsque l'esprit doit se concentrer sur autre chose, c'est parfait. A écouter avec attention pour totalement se laisser emporté, c'est barbant et rébarbatif... 

Allez, moi aussi je vous file quelques cartouches toutes brillantes que je viens de charger tranquillement dans mon Colt.

Aucune continuité avec le travail d'apaisement jovial de la Brute, le Truand dégaine :

 

 

 

 

 

La Brute :

 

La Brute a vraiment du mal avec ces gars du sud, m'y fait vraiment pas...

Concernant le premier morceau, pas du tout...mais alors pas du tout... Nul...

Pour le deuxième, l'instru se laisse écouter... Mac Miller d'habitude si romantique se lache à coup de "ass / bitch / suck my dick". Que se passe-t-il ? Subirait-il l'influence de son gros méchant featuring ? Ou a-t-il désormais des poils sur le pubis ?

Quant au dernier, là où Booba explose son micro sur cette instru, ici, je trouve que c'est moyen...
 

La réalisation du clip est merdique. Le genre de clip dans lequel la Brute voudrait débarquer, couper le contact de la voiture, sortir ce gros cul de renoi par la fenêtre et le jeter dans la Seine, le tout sans un mot ni un froncement de sourcil... La Brute finirait par jeter son zippo dans cette voiture, tournant les talons, direction Boulogne avec ces 3 prostituées de bas étage sous le bras. Elles vont gouter de la cave et voir ce que c'est les vrais sauvages en France...

Mais revenons en au fait : le Truand vire sudiste et j'en grince des dents. J'en suis plutot étonné car la pauvreté des instrus est tout de même évidente...

 

Ta lame s'émousserait-t-elle mon cher ? Ton cuir s'attendrirait-il devant quelques minauderies féminines ?

 

Le vent du sud t'a certainement encrassé le tympan...


Le Truand :

 

Après des semaines d'inaction, le Truand ne peut que se lécher les babines lorsque la Brute décide, après avoir siroter quelques godets avec lui dans un calme relatif, de poser délicatement son pistolet sur le bar en signe de duel imminent.
Le Truand ne va pas se justifier, loin de là ces habitudes, il va simplement démontrer à la Brute qu'elle doit élargir le champ des possibles...

Pourquoi rétorquera-t-elle ? Parce qu'il le faut... et parce qu'elle le fait déjà... mais de façon inconsciente... Devoir en est au Truand que de recadrer tout ceci, aider la Brute à ôter le masque qui se pose devant elle pour voir dès lors la véritable nature des choses...

Aveugle est celui qui n'a jamais ouvert les yeux... Limité dans le débat reste celui qui, malgré la montagne qui se dresse devant lui, refuse de la voir... Tout est une question d'influences, d'origines... Si le Truand a pris l'initiative d'aller visiter ces contrées désertes, ce n'est pas par plaisir mais pour mieux comprendre...

Car des objections, il en a eu quantité... et continue d'en avoir... Musique épurée prônant le synthé, flow laid-back en deçà des confrères de l'Est et de l'Ouest, facilité d'approche pour le novice en mal de doses énergétiques... et donc rejet invétéré du puriste se sentant bien trop cultivé pour se laisser accrocher par ces rengaines appauvries...

Mais force est de constater que depuis les années 2000, le mouvement (les mouvements devrais-je dire tant les sonorités varient d'une ville à l'autre) s'est imposé au nez et à la barbe des régions phares de Etats-Unis. Tendance et satisfaction grand public n'ont jamais rimé avec qualité me répondra la Brute et elle aurait raison. Mais alors penchons-nous sur nos cas personnels.

Sans le voir venir, depuis plusieurs années, nous écoutons autre chose. Nos fondamentaux étaient très golden âge, des compétitions de flow aiguisés sur des boucles bien cachées que seuls nos maîtres vénérés étaient capables de dénicher. Ce rap "so 90's", nous nous en délectons toujours... mais il n'est plus au centre de nos écoutes. Le Wu-Tang, A Tribe Called Quest, Nas, Das EFX, De la Soul, etc..., depuis combien de temps la Brute n'a-t-elle pas eu l'un de ces acteurs dans ces oreilles ? Pire, que s'est-il passé de vraiment frais, nouveau depuis cette fameuse époque dans les capitales du hip-hop ?

La Brute, comme nous tous, a muté et se gargarise désormais devant des instrus rachitiques, épurées, minimalistes et souvent absentes de samples. Parfois sur des flows très laid-back voir ralentis.

La Brute apprécie des titres tels Make It Rain, Dancin' On Your Grave, Purple Swag, Drop It On The 1 ou encore General Patton pour n'en citer que quelques uns.

La Brute avait même composé avec le Truand et son compère arménien une instru un soir où Jack avait multiplié les tournées "on the house" que l'on peut écouter ici-même.

Tout les exemples pré-cités sont d'influence sudiste. Et ça, le Truand l'a découvert en grattant, en allant voir ce qui se cache sous ce vernis pimpant.

Saviez-vous par exemple, chère Brute, que bien qu'originaire de New-York, ASAP vénère Pimp C, feu membre de UGK, immense duo en provenance du Texas, et puise sa musique et son flow ralenti dans le son d'Atlanta ? Pour info, ces flows très slow down proviennent du chopped & screwed de Dj Screw, éminent Dj sudiste qui ralentissait les flows des morceaux sélectionnés dans ces 2000 mixtapes (chiffre réel).

D'ailleurs en parlant d'Atlanta, ce même ASAP a pour illustration de sa mixtape une photo hommage à Stankonia... qui n'est autre que l'un des albums du plus grand groupe de rap qui n'ait jamais existé, je veux bien sûr parler d'Outkast (j'accepte bien entendu les critiques quand à cette prise de position mais, étant donné le niveau atteint par les deux compères tout au long de leurs 7 albums, elles ont plutôt intérêt a être étayées)...

Ceci n'est qu'un exemple certes mais lorsque l'on voit l'importance attaché au jeune prodige, lorsque l'on entend ci et là qu'il est le renouveau de la scène new-yorkaise, on se doit d'expliquer les raisons du succès.

Alors, en obstruant totalement cette région prolifique, en refusant d'y attacher le moindre intérêt, la Brute ne ferait-elle pas comme ses parents et les parents de ses parents, ceux-là même qui condamnaient tout nouveau style de musique comme le jazz et le rock par manque d'ouverture, parce qu'ils ne pouvaient considérer quelque chose qui différait grandement de leurs petites habitudes sonores ? Ne se rangerait-elle pas elle-même, en catégorisant cette musique pour jeunes cons, du côté des vieux cons ?

A méditer...

Plus factuellement, pour répondre aux prises de positions de la Brute :

- le morceau Houston est vraiment un pur produit banger sudiste, le Truand comprend aisément la réticence de la Brute, il se dit que si elle creuse un peu et qu'elle commence à maîtriser ce courant, elle aimera peut être... Mais pour l'instant, il ne peut que comprendre...

- en ce qui concerne le clip, il ne tient clairement pas du génie. Cependant, ce n'est pas ce que le Truand voulait mettre en avant. Là encore, question de connaissance du mouvement : Wacka Flocka Flame est considéré comme un des plus grands acteurs du Sud actuellement donc avoir eu la possibilité de le faire tourner ce clip en France avec Animal Son, c'était quelque chose... Loin du Truand l'idée de mettre en avant quelques qualités de réalisation ou de création que ce soit !

Le tympan du Truand reste donc plus vif que jamais. Par contre, à jouer dans la cour des vieux, les réflexes vont commencer à manquer et la Brute risque de se faire dézinguer d'une balle bien placée par le prochain jeune loup ayant envie de s'amuser...

 

La Brute :


Justement, on ne touches pas au morceau de booba préféré de la Brute... C'est l'antipode du bling-bling, le clip où tu as 70 mecs plantés comme des piquets dans une cité dégeu qui te regarde sans ciller avec un imperceptible mouvement de tête. Et pas un troufion en cabriolet qui fait des weelings sous la tour Eiffel avec 3 poufiasses au gros cul assises à l'arrière...

 

Non mais on est où là...

 

...sacré Truand, heureux de voir ta lame toujours aussi luisante ou comment balancer un bloc de roche pour le recevoir en retour finement travaillé, peaufiné dans le détail...
 

Un retour digne d'un vrai ciselier, je n'en attendais pas moins de ta part sur ma charge plutôt grossière, épaule en avant...

 

Content de retrouver notre fameuse valse, c'est comme trinquer après une bonne vieille rixe de saloon, l'oeil au beurre noir et le sourire aux lèvres, j'apprécie...

 

Je n'ai pas le temps de te répondre en détail mon cher mais bien entendu, je valide l'analyse dans son ensemble... Je comprends cette volonté de découverte et d'ouverture sur ces petits gars du Sud, je compte évidemment sur toi pour nous ramener quelques pepites savamment débusquées, traquées avec la patience d'un Truand flairant le bon moment pour attaquer la diligence...  

...et puis un clin d'oeil également à la petite souris cachée dans la plinthe, qui se ballade dans les murs, l'oreille attentive...

 

La Souris :

 

La petite souris attend patiemment l'agonie des derniers rayons de lumières, le déclin du jour pour sortir le bout de son nez...

Au coucher du soleil, les 3 cowboys pénétreront ... ou pas... dans le saloon...

Quand les portes battantes grincent, elle sent frémir ses petites moustaches. La question n'est pas de savoir qui va dégainer en premier mais plutôt qui, des 3 gringos, va tirer le premier... Elle a bien retenue la leçon de son Truand,  "quand on veut buter un mec, on raconte pas sa vie..."

La petite souris aime écouter ces "Bareback bronc riding" même si dans le saloon ce n'est pas le cheval que le pistolero dompte mais le son... Quelques minutes pour prouver que sa pépite est plus précieuse que les autres...

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